Sans doute avez-vous déjà entendu parler des Zèbres d’Alexandre Jardin. Ce mouvement de « Faiseux », comme les appelle le célèbre romancier, ce conteur talentueux dont sont amoureuses toutes celles qui aiment les jolies phrases, capable d’écrire des romans légers (Fanfan), des histoires de vies beaucoup plus lourdes (Des gens très bien), ou des histoires pour enfants distribués à coup de millions d’exemplaires chez McDo avec les fameux Happy Meal.

Ce que j’aime chez Alexandre, c’est qu’il possède en lui cette folie douce qui permet de croire que l’on peut changer de monde. Il a choisi le zèbre comme animal emblématique. J’aurais plutôt regardé du côté des fauves. Seul un fauve peut défoncer avec autant de force et de conviction le pessimisme ambiant, transpercer d’une épée fondue dans la joie l’immense foule de ceux qui n’y croient pas. Le souci avec les fauves, c’est qu’il faudrait en trouver un qui sourit. Pas évident je le reconnais. Un qui n’est pas un fainéant, aussi, ce qui exclut d’office les lions par exemple. Le Zèbre est sympa, il est plein de rayures lourdes de sens, mais il a un peu trop tendance à se faire bouffer par les autres. Un hérisson sinon ? Il touche tout le monde, on l’aime bien, et en même temps il ne manque pas de piquant… A creuser.

Ce que j’aime chez Alexandre, c’est qu’il a su s’entourer de gens intelligents, compétents, aussi pragmatiques qu’il est rêveur.

Ce que j’aime chez les Zèbres d’Alexandre, c’est qu’ils nous offrent une autre vision de la France. Car oui, osons le dire en risquant de fâcher tous ceux pour qui le french-bashing est devenu un fonds de commerce : la France n’est pas le Bangladesh. Nous avons la chance d’être nés ou de vivre dans un pays extraordinaire. Plein de fractures, de fêlures, bien sûr. Mais un pays extraordinaire quand même. Les Zèbres d’Alexandre Jardin nous rappellent qu’il existe une autre France que celle que l’on nous vend, ou plutôt que celle dont l’on essaie de nous dégoûter, comme si cela pouvait servir quelqu’un. On peut continuer à raconter aux jeunes qu’ils n’ont pas d’avenir autre que le chômage ou l’esclavage (je n’invente rien, le terme est beaucoup sorti pendant les débats sur cette insipide loi El Khomri)… ou l’on peut leur raconter ce que font ces Faiseux, qui un jour se sont levés avec la simple conviction qu’ils pouvaient « changer les choses ». Qui se sont demandés un matin « que puis-je faire aujourd’hui pour que demain soit un jour meilleur ? ». Et alors ils ont fait. Les comptes nickel, que tout le monde peut ouvrir dans un bureau de tabac pour 20 euros. Lire c’est partir, qui vend 2,5 millions de livres à 80 centimes. Zup de Co, qui met l’échec scolaire en échec… La France des Zèbres, elle est belle, elle est talentueuse, elle est travailleuse, elle est enthousiaste… Elle est optimiste.

Ce que j’aime enfin et surtout, c’est que ce mouvement parmi tant d’autres prouvent qu’il existe une autre façon d’imaginer le pouvoir. Pour ne pas s’apercevoir qu’il se passe quelque chose de nouveau, il faudrait n’être jamais allé rencontrer ou écouter Bleu Blanc Zèbre, Nous Citoyens, Nouvelle Donne, Cap 21, Nuit Debout… et tant d’autres, qui ont décidé de réinventer la politique, pour revenir au sens étymologique du terme, perdu depuis longtemps. Longtemps on a expliqué l’abstention et le vote FN par un désintérêt des Français pour la politique. Facile, bien sûr, et désormais impossible à tenir. Les Français ne désintéressent pas de la politique, au contraire ils n’ont jamais été autant concernés par l’avenir de leur « cité », de leur pays. Simplement ils veulent une autre politique. Ils sont des millions à suivre ces mouvements citoyens. Des millions à attendre des idées neuves, à s’enthousiasmer pour des initiatives efficaces et intelligentes. Des millions à attendre qu’un Podemos cartonne en France. 80% des Français, si l’on en croit les sondages, seraient prêts à voter pour un candidat issu d’aucun parti, ce qui explique sans doute que certains parlementaires aient décidé en urgence de voter une réforme minable des règles encadrant l’élection présidentielle, notamment en verrouillant au mieux les parrainages attribués par les maires. C’est petit, tout petit même, mais cela ne changera rien : il n’y a pas meilleure manière d’encourager un changement qu’en tentant de l’empêcher. La preuve, cette réforme effectuée à la va-vite dans l’urgence d’une élection qui se profile a eu pour effet d’unir ensemble tous ces nouveaux acteurs. Ensemble en effet ils ont cosigné des tribunes, ensemble ils annoncent petit à petit une grande primaire citoyenne censée désigner celui qui représentera la nation face aux professionnels de la politique.

Ce que j’aime chez tous ces mouvements citoyens, c’est qu’ils nous laissent entendre que la révolution est en marche. Et ce qui est chouette avec cette révolution-là, c’est qu’elle est joyeuse.