Pour une fois solidement installé sur mon canapé à l’heure où commencent les JT, ayant comme beaucoup de français profité de ce jour férié, j’ai regardé celui de TF1 avec beaucoup d’intérêt. Et appris par la même occasion les détails du nouveau drame qui s’est déroulé hier au Bangladesh, quinze jours après celui qui a fait perdre la vie à plus d’un millier de personnes. Ou comment des salauds de patrons, des vrais, ont tué des gens.

Bien sûr rien de vraiment neuf dans cette histoire, on n’a pas attendu ce triste jour pour apprendre que les populations locales de ce pays (souvent à la Une des journaux pour les catastrophes climatiques qui le touchent) sont exploitées par de grands groupes occidentaux, notamment dans l’industrie du textile. Mais comme à chaque fois, on ne peut que déplorer l’absence de réactions avant qu’il y ait des victimes. Comme si rien n’était envisageable sans l’horreur suscitée par un évènement tragique.
Et même maintenant… La vague de phrases chocs qui émanent de partout depuis hier aura-t-elle d’autres conséquences qu’occuper les colonnes des journaux ? Comment moraliser les comportements des leaders de l’habillement ? Est-il seulement possible d’envisager cela ? Des chefs d’ateliers ont refusé à leurs ouvriers de déserter l’usine le jour-même où elle s’est effondrée il y a deux semaines, malgré l’injonction des autorités locales 24 heures plus tôt. Ignoble bien sûr, mais ils ne sont pas les seuls responsables. Leurs clients, de grandes marques ou de grands distributeurs dont certains français leur demandent de tenir des délais et des tarifs impossibles, et participent eux aussi à ce système. On ne peut qu’accueillir positivement le discours de Galen Weston, PDG de Loblaw, dont l’un des fournisseurs (Joe Fresh) était client de l’usine qui s’est écroulée. Il reconnaît la responsabilité des grands groupes qui doivent absolument user de leur pouvoir économique auprès du gouvernement bengalais pour le sommer d’améliorer les conditions de travail pratiquées. Il est par ailleurs le premier à s’engager à indemniser les familles des victimes, et s’étonne du manque de réaction de ses concurrents… Les cyniques diront que c’est de la com’, étant un grand optimiste j’ose croire qu’il y a une once de sincérité dans son discours.
Rien ne nous assure aujourd’hui que les choses vont changer demain, mais croisons les doigts pour que journalistes et politiques suivent l’affaire de près… Car réhabiliter l’entreprise n’est pas qu’un combat national.