On pourrait presque en rire s’il n’y avait 170 000 étudiants dans l’incertitude la plus complète quant à leur programme des prochains mois. Un an après avoir été tant décriée, la plateforme « APB » semble être regrettée par un certain nombre d’observateurs, qui n’hésitent pas demander son retour, si peu de temps après été tant honnie.

Le problème n’est ni APB, ni Parcoursup, même si celle-ci devra être grandement améliorée dans l’année à venir. Le problème il est mathématique : tant que l’on continuera à envoyer 50 000 étudiants dans des filières où il y a 5 000 places, cela fera 45 000 déçus. Tant que l’on continuera à former des jeunes pour des métiers qui n’embauchent plus depuis la Saint Glinglin (pardon pour la formule triviale), on nourrira le monstre Chômage.

Nous payons des décennies d’une politique de dénigrement des filières professionnelles. Une politique du chiffre, puisque l’objectif de 70% d’élèves en filières générales avait été donné aux chefs d’établissement, qui a merveilleusement fait rimer formation professionnelle avec échec. Combien de fois a t-on entendu voire prononcé cette phrase fatale : « Tu n’es pas bon à l’école ? Attention, tu vas partir faire un CAP ».

Cette stratégie désuète se traduit concrètement par la désertification de nombreux CFA, et l’engorgement de filières très généralistes ne débouchant pourtant que sur peu d’emplois. La France compte des dizaines de milliers de psychologues en herbe, des dizaines de milliers de journalistes (alors que les groupes médias doivent créer à eux tous environ cinq emplois par an), mais n’a plus d’ouvriers dans le bâtiment ou de comptables.

Si les regards changent, l’évolution est trop lente. Il est impératif de remettre au gout du jour ces formations qui débouchent sur un job, le plus souvent aussi honorable que correctement payé. Il est impératif de prendre en considération ce million d’emplois à pourvoir dès aujourd’hui quand on oriente nos jeunes vers un métier. Il est impératif, enfin et surtout, de rendre nos enfants acteurs de leur orientation, eux qui la subissent trop souvent. Plus nous les connecterons tôt au monde qui les entoure, plus nous leur permettront de se révéler, de se connaître, d’apprendre quels sont leurs talents, leurs rêves, ce qu’ils aiment et ce qu’ils n’aiment pas, plus ils sauront faire les bons choix.

Sans cela, on peut décider de garder Parcoursup, de revenir à APB, ou d’inventer un nouveau site, rien ne changera : le sujet « marronnier »  animera de nouveau l’été prochain.

Julien Leclercq